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Texte philosophique – François Dagognet : « Penser le vivant »

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« Le mot « artifice » est un mot malheureux parce qu’il est connoté de manière négative. Mais l’artificiel, c’est l’art. L’homme se reconnaît en son pouvoir démiurgique de tout changer, de tout renouveler, de tout reconstruire. Ceux qui veulent limiter cette prouesse me semblent livrer une bataille perdue d’avance. Il n’y a rien de naturel vraiment. Ce qui nous paraît naturel est bien souvent artificiel. La nature, dans ses formes les plus typiques pour nous, porte l’empreinte de l’homme. La campagne telle que nous la voyons aujourd’hui est le fruit de longues transformations : les champs, les forêts, les sentiers ont été modelés par l’homme. Considérez les fruits et les légumes : ils ne sont pas naturels ; l’agronomie les a sélectionnés, les a croisés pour les améliorer. La révolution verte en intervenant sur la nature a été très profitable à l’homme et lui a permis d’échapper à bien des servitudes. l’agronome américain Norman Ernest Borlaug, prix Nobel de la paix en 1970, a ainsi pu dénaturer le blé pour le rendre plus résistant à la sécheresse et à des conditions climatiques très difficiles. Grâce à ce blé, des pays quasi désertiques ont pu cultiver le blé et échapper aux disettes. Bénissons donc les artifices. La nature n’a jamais existé sauf comme idéologie pour certains afin de condamner les changements. Que peut-il y avoir de naturel ? L’homme a tout façonné, tout modelé, repris à son compte, assumé, transformé. Il est certain que l’environnement doit être protégé. Ce serait ridicule de dire le contraire. Mais à partir de là, il faut limiter ce droit au respect des lieux. Certains tombent dans une philosophie de la nature excessive. Or, il s’agit d’une bataille qui est plus idéologique que réelle au sens où certains défendent par là une mythologie. Ce qui me navre le plus, c’est que cette mythologie est exploitée, notamment par la publicité. Elle est aussi devenue un slogan politique : or si elle est vraie sur certains points, on n’a pas le droit de la généraliser. Je regrette vraiment cette technophobie ambiante. »

 Penser le vivant. Rencontre avec François Dagognet

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